Je rebondis sur un article du Capitaine Commerce qui prend le contrepied des chiffres publiés récemment par la FEVAD sur la bonne santé du secteur du e-commerce, ainsi que ceux de la société Oxatis sur le profil des e-commerçants.
La vision des études sur le e-commerce
Je ne vous refais pas le topo global sur la soit-disant bonne santé du secteur, le résumé des chiffres de la FEVAD est là, et ci-dessous l'information la plus commentée dans de nombreux médias et blogs :
"Au cours des 12 derniers mois, le nombre de e-commerçants a franchi un nouveau record avec 64 100 sites marchands actifs recensés, soit une augmentation de 35% par rapport à 2008. Au total, environ 17 000 nouveaux sites marchands actifs ont vu le jour en 2009 (vs 11 800 en 2008). Il se crée près de 2 sites marchands toutes les heures en France." Source FEVAD 2010.
Et le discours de notre ministre Hervé Novelli sur les chiffres annoncés.
En bref, si on les écoute, se lancer dans l'e-commerce, c'est à la portée de tout le monde (ça c'est techniquement vrai). Par contre, soyez assuré qu'y réussir et s'enrichir, c'est une autre affaire...
Et voila pourquoi :
La réalité du marché
J'attend avec impatience le jour où la FEVAD (ou un autre organisme) sortira son étude sur le taux de réussite des e-commerçants à 1 an, 3 ans et 5 ans. Et peut-être sur leurs revenus issus de cette activité (mais sur ce deuxième point, je pense que je rêve...).
Je prédis que l'enthousiasme général va se prendre une claque, car il y a fort à parier que ces chiffres seront étroitement corrélés à ceux de la création d'entreprise en France. Car après tout, lancer un e-commerce, même en tant qu'autoentrepreneur, c'est bien une création d'entreprise à part entière, avec les mêmes règles pour réussir (et pour se planter aussi).
D'après l'APCE (Agence Pour la Création d'Entreprise), le taux de mortalité des entreprises est supérieur 50% au bout de 5 ans. L'APCE nous donne les chiffres suivants sur les raisons des échecs:
Si je reprends les raisons principales pour une entreprise classique, et fais le parrallèle avec un site d'e-commerce :
- Les carences commerciales : cela correspond à toute la partie wemarketing pour créer du trafic sur son site, et au merchandising qui consiste à animer commercialement son site pour transformer ce trafic en clients.
En e-commerce, ce poste est encore plus stratégique pour la réussite de votre entreprise car, en plus d'être bon commercial, il faut surtout être un webmarketeur aguéri pour connaitre et utiliser avec efficacité les différents outils et moyens à votre disposition. Cela peut sembler être une évidence pour les lecteurs de ce blog, et pourtant, combien de projets vois-je passer où le futur e-commerçant n'a plus les moyens de se payer 1 an de référencement ou une campagne de prospection par emailing après avoir payé la création de son site ...
- Les connaissances en gestion trop faibles sont aussi un gros handicap. Impossible de piloter son affaire sans être capable de calculer sont taux de marge, des gérer ses stocks, ses achats... Tout cela influence fortement votre stratégie globale. En e-commerce, une logistique sans faille et une gestion rigoureuse des stocks sont des facteurs clés de succès.
- Le défaut de compétences techniques : même si tout le monde peut aujourd'hui créer et gérer sa boutique en ligne sans compétences techniques, ne pas en avoir complique clairement les perspectives de développement si vous restez seul, ou n'avez pas les moyens de vous payer un webmaster le moment venu.
Internet, c'est avant tout un environnement technique. Pour être capable de faire évoluer son site au niveau fonctionnel et ergonomique, pour comprendre comment son site est référencé dans les moteurs de recherche, pour comprendre les facteurs qui permettent de faire un bon emailing, ... A un moment ou un autre, si vous restez seul, il faudra mettre les mains dans le camboui, et sans expérience ou connaissance en la matière, attendez-vous à essuyer quelques plâtres qui peuvent coûter chers.
- Le caractère du créateur : comme pour toute entreprise, rien n'est simple (si si, je vous assure, ceux qui vous disent le contraire sont des charlatans), il faut s'accrocher et garder le cap contre vents et marées. On peut créer sa boutique en 3 heures, et de la même manière, on peut être déçu tout aussi vite.
Atteindre 200 connexions/jour sur son site peut prendre des mois et un travail sans relache avant de gagner quelques clients. Il vaut mieux y être préparé.
Heureusement...
... il y a une statistique qui donne une bonne idée de la manière dont il faudrait s'y prendre pour ne pas se manger le mur au bout de quelques années, voire quelques mois pour certains : le taux de réussite des entreprises au bout de 5 ans est 2 fois plus élevé lorsqu'elles ont été crées dans le cadre d'un incubateur, ou qu'elles ont fait l'objet d'un accompagnement.
Futurs e-commerçants, à méditer....
Commentaires
merci! vos conseils st vraiment precieux! mais qu'est ce quevous voulez dire par
"crées dans le cadre d'un incubateur"?
@Landry : je reprend la définition de Wikipedia > Un incubateur d'entreprises est une structure d'accompagnement de projets de création d'entreprises. L'incubateur peut apporter un appui en termes d'hébergement, de conseil et de financement, lors des premières étapes de la vie de l'entreprise.
Les incubateurs peuvent se différencier entre eux par les services qu'ils proposent, leur caractère lucratif ou non, ou encore le type de projets qu'ils ciblent." source http://fr.wikipedia.org/wiki/Incubateur_d%27entreprises
Autrement dit, c'est une forme d'accompagnement très opérationnelle.
Ludovic
Intéressante cette approche plus gestionnaire, et je suis totalement d'accord.
C'est hallucinant le nombre de post sur ce sujet ces derniers temps, instant déprime dans le e-commerce ? C'est la révélation ? La redescente sur Terre ?
@ Nico : La descente sur Terre n'a pas encore eu lieu et n'aura probablement pas lieu avant quelques années car le message matraqué par les institutions du secteur, et la majorité des prestataires de solution e-commerce ne va pas dans ce sens.
Les discours réalistes viennent principalement de certains professionnels du e-commerce qui sont ancrés dans la réalité des entreprises et qui voient les dégâts que peuvent provoquer ce genre de discours biaisé sur "l'eldorado du e-commerce".
En tant que professionnel, je rencontre surtout des e-commerçants qui me tiennent le discours "mon business ne décolle pas, je tente avec vous un dernier truc et si ça ne marche pas, je ferme la boutique..." plutôt que des e-commerçants qui me disent "J'ai plein d'argent à investir et je voudrai que vous m'aidiez à me développer encore plus". :-(